Lancement du collectif P.A.I.X et manifeste pour un accueil inconditionnel dans l’Église catholique


Après des semaines de travail et de réflexion, je suis très heureux de vous annoncer le lancement officiel du collectif P.A.I.X !

Pour comprendre les raisons de la création de ce collectif, je vous invite à lire cet article que j’ai publié hier :

Je tiens ici à remercier Fanny, Violette, Julien et Jean-Michel pour leur aide dans l’amélioration de ce manifeste et la création du collectif.

Un immense merci à Louise pour le logo du collectif et à Violette pour l’idée de cet acronyme P.A.I.X !


Logo réalisé par Louise Nay

Le manifeste

Le collectif Pour un Accueil Inconditionnel dans l’Église sous l’acronyme P.A.I.X (le X est une croix catholique penchée pour représenter l’Église en crise), regroupe des catholiques et des croyants chrétiens souhaitant un changement profond au sein de l’institution ecclésiale mais également dans son dogme. L’objectif est de sortir de la résignation et de la passivité en utilisant tous les moyens d’actions (non violents) à notre disposition pour faire entendre notre colère et mettre la pression sur l’ordre établi dans l’Église afin d’accélérer la mise en place des réformes nécessaires. Ce collectif a vocation à unir ses forces, lors de manifestations et d’actions, aux autres collectifs voire associations luttant pour une plus grande justice et égalité dans la religion catholique. Dans les évangiles, Jésus déclare « Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix ». Cette paix évangélique est pour nous celle de la conviction intérieure que nous sommes tous et toutes aimés et accueillis inconditionnellement.

Nous, catholiques de tous âges et de tous horizons, éloignés de l’institution religieuse ou simplement révoltés vis-à-vis de la situation actuelle, faisons le constat suivant : l’Église et sa doctrine ne permettent pas un accueil inconditionnel en toute sécurité des personnes dans leur singularité. Pire, l’institution qui a montré son incapacité à se réformer en profondeur pour mettre fin à la violence exercée sur ses fidèles, ses religieuses et son clergé, se rend coupable de souffrances inutiles, de vies brisées et de victimes innocentes.

Avec son traitement différencié des personnes en fonction de leur orientation sexuelle, de leur sexe biologique, de leur identité de genre, de leur situation maritale ou de leur choix d’avorter, l’Église bafoue le message radical de Jésus contre toutes formes d’exclusion, de discrimination ou de rejet.

Rappelons-le : aucune paix intérieure n’est possible sans un accueil inconditionnel de ce que nous sommes.

En 2021, l’horreur a été portée à notre connaissance. La sortie du rapport de la Commission indépendante sur les abus sexuels commis dans l’Église (CIASE) a eu l’effet d’une onde de choc chez les fidèles et au sein de l’institution religieuse. Le nombre de victimes mineures d’agressions sexuelles commises par des prêtres, diacres, religieux ou religieuses, s’établit à 216 000 sur la période allant de 1950 à 2020 et monte à 330 000 si on comptabilise également les abus commis par des laïcs (personnel des établissement catholiques, laïcs assurant le catéchisme…); l’âge moyen des victimes est de 12,5 ans; entre 2900 et 3200 clercs et religieux abuseurs; un taux de prévalence deux à trois fois supérieur que dans les autres institutions…

Si le rapport de la CIASE a permis de mettre en lumière les crimes sexuels systémiques au sein de l’Église envers les enfants, il nous paraît nécessaire de rappeler que la pédophilie n’est malheureusement pas la seule situation de danger dans cette institution. Nous pouvons citer les crimes sexuels commis contre des religieuses, les abus spirituels et les dérives sectaires au sein de nombreuses communautés, les situations de souffrances psychiques de prêtres notamment à cause de la solitude pouvant mener à des suicides, ou encore les « thérapies de conversion » visant à modifier l’orientation sexuelle des personnes homosexuelles et qui sont considérées par l’ONU comme « des actes de tortures »1 ! Au lieu d’être un espace d’épanouissement et d’accueil inconditionnel, l’Église est pour beaucoup un lieu de rejet, de souffrance voire de danger.

Nous ne pouvons plus accepter que nos demandes de changements de fonds sur la doctrine et la structuration de l’Église qui permettraient plus d’égalité et de justice en son sein, ne soient pas prises en compte par crainte de voir une part des fidèles plus conservateurs claquer la porte. La peur d’un « schisme » qui viendrait briser « l’unité des catholiques » est présente parmi les responsables de l’institution. La vision d’une « unité des catholiques » part certes d’une bonne intention mais nous craignons qu’elle ne soit qu’un fantasme voire une dangereuse illusion. Comment parler de « l’unité des catholiques » quand 244 000 personnes en Europe ont quitté l’Église cette année2 ? Quand seulement 8 % des catholiques vont régulièrement dans un lieu de culte3 ? Quand le nombre de personnes demandant l’apostasie (l’annulation du baptême) ne cesse d’augmenter en France pour atteindre le chiffre record de 2200 en 2018 soit plus de la moitié du nombre de nouveaux adultes baptisés selon les estimations4? Voir dans ce constat une « unité des catholiques » qui mériterait de ne pas opérer les réformes nécessaires et demandées par une part de plus en plus importante de croyants, c’est au mieux naïf et au pire du déni ou une profonde hypocrisie.

Nous, signataires de ce manifeste, avons l’intime conviction que ce constat dramatique illustre la situation d’une Église malade. Mais d’un mal qui n’est ni incurable, ni une fatalité. Nous ne pouvons plus faire comme le prêtre et le lévite dans la parabole du bon samaritain en détournant notre regard de la souffrance de nos prochains ! Maintenir l’Église dans cet état, ce n’est en aucun cas lui rendre service. Pour éviter que cette maladie continue de faire souffrir inutilement des personnes innocentes, il est urgent de réformer l’institution.

Le rapport sociologique de la Conférence Catholique des Baptisé·e·s Francophones auprès des « éloignés » de l’Église catholique est pour nous un motif d’espoir. Il apparaît clairement que la majorité des départs de l’Église catholique sont liés aux positionnements et à la doctrine de l’Église mais que ces « éloignés » sont des personnes majoritairement attachées au christianisme et souhaitant contribuer aux transformations sociales et organisationnelles dans l’institution catholique. Nous sommes nombreux et nombreuses à considérer que l’Église pourrait un jour incarner véritablement le message émancipateur des évangiles. Mais pour cela, il est temps de sortir du déni pour les uns, du silence et de la passivité pour les autres.

Il est temps de faire entendre la voix de celles et ceux dans l’Église refusant que la religion catholique serve de caution au repli identitaire, au retour à des rites anciens ou à la discrimination entre les individus. Face à des personnes mettant en place des stratégies efficaces pour maintenir un dogme conservateur ou utilisant Dieu pour légitimer leurs convictions discriminantes, prier et incarner à son échelle les valeurs des évangiles ne suffiront pas. L’idéal du chrétien humble et discret nous mène dans une impasse.

Face à ce constat, nous ne pouvons plus rester passifs sans agir. Il est temps de bousculer l’ordre établi dans l’Église et accélérer le changement nécessaire. « Faites la révolution, faites du désordre. Le monde est sourd, il faut lui ouvrir les oreilles » conseillait le pape à des activistes écologistes français5. Pourquoi ne pas appliquer ce conseil face à une Église sourde à la souffrance d’une part importante de ses membres ?

Pour entraîner un véritable mouvement de changement interne à l’Église, nous devons dépasser nos intérêts personnels pour embrasser une cause collective et solidaire. Quelles que soient nos caractéristiques propres, nous devons ensemble lutter pour les droits des femmes, des personnes LGBT, des divorcés-remariés, des enfants… Avoir des privilèges dans l’Église ne doit pas être un frein à un engagement pour davantage de justice et d’égalité. Si nous suivons le message de Jésus, aucune souffrance ne doit nous laisser indifférent car nous sommes tous et toutes des frères et des sœurs.

Le temps du déni, de l’hypocrisie et de l’omerta doit appartenir au passé. Nous allons avoir besoin de faire entendre notre colère trop longtemps restée silencieuse. Nous devons agir vite pour stopper l’hémorragie et éviter d’autres vies brisées, d’autres victimes, d’autres morts. Pour ce faire, nous souhaitons utiliser tous les moyens d’actions non violents à notre disposition dans le but de faire évoluer la doctrine et la structuration de l’Église catholique.

Des personnes vont probablement être bousculées dans leurs croyances, si les réformes majeures pour lesquelles nous militons venaient à se mettre en place comme la suppression du péché pour l’homosexualité, la fin du célibat obligatoire des prêtres ou encore l’accession à tous les postes à responsabilité pour les femmes. Si aujourd’hui nous luttons contre les idées portées par des personnes conservatrices pour contenir leur vision de la foi qui empiète sur les droits fondamentaux d’autres personnes, demain, dans le cas de la mise en place des réformes pour plus de sécurité et d’égalité dans l’Église, nous ferons de notre mieux pour être présents et dans une position de contenance pour les personnes déstabilisées par ces changements.

Nous ne sommes pas habités par la haine, simplement par une colère et un profond besoin d’égalité, de sécurité, de justice, et d’accueil inconditionnel pour tous et toutes au sein de la religion catholique. Nous réaffirmons ici que nous sommes tous et toutes dignes d’être aimés et accueillis inconditionnellement. La lutte de notre collectif n’est pas contre l’Église mais bien pour l’Église.



Pour signer le manifeste :

https://docs.google.com/forms/d/e/1FAIpQLScgYz_qqlDEN0bTQU4xhwbx837qfhzCxorS5G7vm6-MeaS0HA/viewform?usp=sf_link

Signer ce manifeste permet de poser un premier geste pour sortir de l’immobilisme et de la passivité dans lesquelles nous sommes beaucoup à avoir sombré face aux difficultés de faire évoluer une institution vieille de 2000 ans. Cette signature n’engage à rien envers le collectif, elle est simplement une marque de soutien. Pour notre collectif, le nombre de signatures nous permettra de démontrer que nous sommes nombreux et nombreuses à souhaiter un changement majeur au sein de l’institution. Si notre manifeste trouve un écho en vous et que vous souhaitez nous rejoindre, vous pouvez nous envoyer un mail à : pourunaccueilinconditionnel@gmail.com

Il n’est pas nécessaire de partager tous les constats ni toutes les revendications pour être membre du collectif. Nous souhaitons aussi être un espace de dialogue et de rencontres entre des catholiques de différents horizons mais partageant un désir profond de voir l’Église évoluer pour incarner davantage l’inclusion que l’exclusion.

Pour découvrir notre site internet :

https://pourunaccueilinconditionneldansleglise.wordpress.com/

Pour nous rejoindre sur nos réseaux :


1 https://www.ohchr.org/fr/stories/2020/07/conversion-therapy-can-amount-torture-and-should-be-banned-says-un-expert

2 Selon les chiffres du Vatican : http://www.fides.org/fr/stats

3 Selon les chiffres de l’Insee, « La diversité religieuse en France : transmissions intergénérationnelles et pratiques selon les origines ».

4 Estimation réalisée par CheckNews de Libération à partir des informations communiquées par les diocèses.

5 https://www.la-croix.com/Religion/Le-pape-jeunes-Francais-engages-Faites-revolution-2021-03-15-1201145822

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